3 janvier 2017

Premier Contact

Au début, on a l'impression que se joue quelque chose d'important. On a hâte de rencontrer ces extraterrestres, de rentrer dans leur suppositoire géant, et de savoir ce qu'ils pourraient bien vouloir nous dire. Si l'on passe les fautes de goût lors de ces faux flashbacks à l'image embuée dégueulasse, toute la première partie du film est assez réussie et particulièrement captivante. Nous sommes même scotchés lors de la première rencontre, de loin le meilleur moment du film, avec cette belle idée d'inversion de la gravité une fois arrivé dans le vaisseau, où les visiteurs sont invités à faire un saut pour se retrouver debout, à la verticale. Nous sommes prêts à suivre la linguiste incarnée par Amy Adams dans ses recherches, pas à pas, quitte à manger des dialogues explicatifs lourdingues, ici plutôt bien emballés. Nous y croyons dur comme fer et nous pensons effectivement avoir mis la main sur ce chouette film de SF vanté par les critiques unanimes. 




Hélas, tout cela se délite progressivement. D'abord, quand Denis Villeneuve accélère maladroitement le rythme de son récit via la voix off du chercheur campé par Jeremy Renner qui nous explique les avancées des recherches pour décrypter le langage alien. On se sent alors comme abandonnés dans la dynamique du film. Et ensuite, quand les relations avec les aliens sont temporairement coupées, Premier Contact perd alors définitivement son souffle et l'intérêt de son départ canon, et s'enchaînent les incohérences (la bombe amenée tranquillement dans le vaisseau...) ou les facilités de scénario (ce petit cours de géopolitique du pauvre...). 




Enfin, quand nous comprenons le fin mot de l'histoire, on se demande bien comment il aurait été possible de se passionner et de vibrer pour ce drame intimiste concernant des personnages si désincarnés, ennuyeux et sans substance. Amy Adams fait tout son possible, mais que peut-on dire de son personnage ? Il n'existe à aucun moment. C'est une linguiste persévérante, pugnace... et quoi d'autre ? Jamais on ne la voit vivre, rire (le film se prend drôlement au sérieux), dans son immense baraque où elle ne fait que se servir des verres de vin blanc devant la gigantesque baie vitrée ou admirer les mille bouquins qui trônent sur ses étagères pour nous rappeler qu'on tient là une vraie intellectuelle. Très triste aussi est la romance qui finit par lier les deux chercheurs. Le terme de "romance" est d'ailleurs bien fort puisqu'il ne se passe strictement jamais rien entre eux. Denis Villeneuve est bien incapable de nous faire ressentir quoi que ce soit. Quand, à la fin du film, Jeremy Renner déclare sa flamme et dit à sa collègue, "J'ai passé mon temps à regarder dans les étoiles alors que j'avais tes eins sous les yeux...", la tirade est bien sentie, mais c'est un peu tard. 




Par ailleurs, Premier Contact est encore un film qui veut véhiculer un beau message sur l'humanité, ici appelée à apprendre à communiquer et à agir collectivement, mais où celle-ci trouve néanmoins son salut à travers les actes d'un personnage peu à peu doté de facultés hors normes. Est-il impossible de délivrer un tel discours sans prôner l'héroïsme le plus bêta ? Alors certes, le film de Denis Villeneuve aborde des questions intéressantes, il paraît traiter avec intelligence et une finesse inhabituelle le thème de la rencontre extraterrestre. Mais faut-il que la concurrence se porte mal pour qu'un tel film se fasse tant remarquer. La complexité d'apparat, la triste froideur et le sérieux plombant de Denis Villeneuve rappelant le cinéma de sieur Nolan, il y a somme toute une logique en ce bas monde... 


Premier Contact de Denis Villeneuve avec Amy Adams et Jeremy Renner (2016)

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